LA GIFLE, DU FÉMININ AU MASCULIN

Il est paradoxal que ce soit une gifle (l’expression culturelle et artistique la mieux affirmée de l’expression violente de « la » femme, à commencer par sa représentation classique au cinéma, avec ou sans dimension hystérique) qui abatte aujourd’hui un homme pour en avoir usé. Adrien Quatennens, dont j’ignore tout hormis la présence publique qu’on lui connaît, tombe sous l’infamie d’une peine de prison avec sursis relayée par l’empressement de sa formation politique à l’exclure. Je n’ai pourtant pas entendu, ici ou là, qu’Adrien Quatennens fût en soi, structurellement, un homme violent, même si j’ignore le contenu des sms alors adressés à son épouse, qualifiés de harcèlement. Sauf à considérer que, par définition tous les hommes sont violents. CQFD. Encore que le harcèlement soit une matière parfaitement non genrée. CQNFD.

Mais la gifle peut être aussi publique et par conséquent magnifiée pour sa force symbolique ; elle produit un effet moral galvanisant, même s’il arrive qu’elle signifie offense avec effet contraire. Et lorsqu’une femme en use physiquement à l’égard d’un homme conçu ou perçu comme un goujat – ou présupposé tel – elle en tire immanquablement un succès d’estime assorti du bénéfice du dénouement du conflit en sa faveur. À l’inverse, la représentation de l’homme giflé devant témoins n’appelle aucune rébellion de sa part puisqu’il perd tout simplement « la face » et ne peut que s’éclipser ou produire une violence plus grande. D’un atavisme culturel l’autre. On comprend qu’il n’en va pas de même pour la femme giflée avec ou sans témoins.

Cependant, après la condamnation à la prison avec sursis d’Adrien Quatennens1 pour son acte hystérique, adviendra-t-il que ce tarif judiciaire s’applique universellement aux femmes et aux hommes coupables de gifler des congénères? J’ai peine à croire à l’égalité de traitement en cette matière car il n’y est pas question de justice (par exemple au sens où Eva Joly la défend, au point d’avoir dû s’exiler de France) mais de politique, je veux dire de spectacle politique porté par l’expression des catégories sociales moyennes et supérieures qui ont fait de la revendication sociétale la seule qui fasse refrain dans les médias, la révolution sociétale ! Au détriment des grandes questions sociales, toujours plus lourdes et toujours reléguées : comme une gifle à ceux qui, n’ayant pas la parole ou la prenant à la façon des « Gilets Jaunes » en partie disqualifiés à gauche, se voient reprocher d’alimenter l’éternel front national. Mais l’essentiel n’est-il pas d’éviter toute révolution populaire ?

1Qu’on ne dise pas qu’il a été condamné à « du sursis » comme je l’ai entendu sur les ondes. Il ne s’agit pas d’un raccourci mais d’un euphémisme disant la banalisation de la pénalisation des relations, que n’assument pas celles et ceux qui la promeuvent.

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